Événement
09 oct 2022

Journée Mondiale de la santé mentale : Comment est-ce que l'OIM soutient la capacité de résilience des migrants ?

 

En Afrique de l’Ouest et du Centre, près d’un tiers des migrants de retour ayant reçu une assistance de l’OIM a également bénéficié d’un soutien psychosocial. À travers l’accueil, les premiers secours psychologiques (PSP) et le référencement vers des services de santé mentale spécialisés, l’OIM soutient les migrants et leurs familles. L’objectif est de leur permettre de surmonter les épreuves vécues et parfois les traumatismes rencontrés sur la route migratoire. Il s’agit donc d’un appui précieux sur le long chemin vers la reconstruction d’un projet de vie, dans la dignité.

Les premiers secours psychologiques dispensés par l’OIM impliquent une aide humaine, solidaire et concrète, sans spécialement pousser les individus à raconter ce qui leur est arrivé. Ils permettent d’aider les migrants a stabilisé leur état émotionnel après un incident critique. En effet, dans les situations de déplacements, la vulnérabilité s’accroît considérablement. Ainsi, les migrants sont susceptibles d’avoir été exposés à la mort, la violence, les abus, l’exploitation ou encore la discrimination dans l’accès à des services de base. Ces expériences traumatiques peuvent engendrer des problèmes d’hypervigilance, d’insomnies, de confusion mentale ou d’évitement de certaines situations. Comme l’explique Émilie Sepulchre, Experte en santé mentale et soutien psychosocial communautaire à l’OIM : « il est essentiel de rassurer les migrants sur leur propre état en leur expliquant qu’il s’agit de réactions psychosomatiques normales qui surviennent après avoir vécu un événement anormal ». Cet appui est également l’occasion d’identifier les individus ayant besoin d’une aide psychologique spécialisée et de les référer vers les services adaptés disponibles.

De retour dans leurs communautés, les migrants peuvent également faire l’objet d’un accompagnement psychosocial adapté. Émilie Sepulchre, précise d’ailleurs que cette étape engendre parfois de nouvelles stigmatisations et de nombreux challenges individuels et communautaires : « Les souvenirs des expériences traumatiques vécues sur le chemin de la migration et parfois même avant le départ viennent également complexifier l’expérience individuelle et collective du retour. » Les migrants peuvent éprouver des émotions intenses comme la peur, la colère ou encore la tristesse à l’origine de différentes réactions psychocorporelles. Fournir un soutien psychosocial sur le lieu de la réintégration du migrant, notamment au sein de sa famille est donc fondamental.

Toutefois, Émilie Sepulchre tient à nuancer, en spécifiant que : « Les êtres humains qui vivent des incidents traumatiques peuvent ressentir un stress traumatique aigu, cependant la majorité ne souffrira pas de syndrome de stress post-traumatique sur le long terme. » Une grande partie des migrants arrive à puiser dans leurs ressources personnelles. Parfois, certains migrants demandent de l’aide à leurs réseaux sociaux pour se reconstruire et retrouver leur place, dans la résilience.

En psychologie, la résilience est la capacité de faire face à une situation difficile et génératrice de stress pour se rétablir rapidement. L’aptitude d’un individu à rebondir face à une crise dépend d’un ensemble de caractéristiques individuelles telles que le sexe, le niveau d’éducation, les caractéristiques physiques, l’expérience, les croyances, l’état de santé ou encore le statut au sein de la communauté.

L’OIM veille à ce que les migrants aient accès à la santé mentale à travers une approche fondée sur la résolution de problème. Il s’agit de mettre l’accent sur les forces et les capacités plutôt que sur les déficits. Des sessions d’écoute individuelles et personnalisées sont organisées pour permettre aux individus de retrouver des éléments d’auto-reconnaissance positive. Les migrants de retour sont ainsi encouragés à prendre des décisions ou encore à faire des activités qui leur font du bien pour retrouver confiance en eux et renforcer le processus de résilience. Ils ont aussi un rôle clé à jouer dans le soutien entre pairs. La campagne Migrants comme Messagers menée depuis 2017 dans la sous-région, illustre parfaitement la volonté et la capacité que les migrants de retour déploient pour s’emparer de problématiques liées à la santé mentale.

La résilience doit également être envisagée de manière globale. La famille constitue souvent le premier lieu vers lequel les individus se tournent, par conséquent, elle doit faire l’objet d’une attention particulière. L’accompagnement des familles autour de la question du retour des migrants est cruciale. L’OIM agit sur la communication positive et la bienveillance interpersonnelle. Les familles disposent de moyens qui leur permettent d’aller de l’avant après une crise. Certains facteurs fournissent des indications sur la capacité de résilience familiale : la taille de la famille, le statut socio-économique, les antécédents de migration, la discrimination sexuelle, la dynamique familiale ou le statut de la famille au sein de la communauté. En effet, la famille s’insère dans un contexte communautaire plus large. Ce dernier a son importance, dans la mesure où les communautés bénéficiant de réseaux sociaux solides et d'un accès aux ressources peuvent apporter soutien et protection. Les leaders communautaires, spirituels et les personnes influentes sont donc ciblés par l’approche de l’OIM. Des séances de sensibilisation autour des questions de santé mentale et soutien psychosocial communautaire sont fréquemment organisées. Elles permettent de renforcer les capacités collectives de résilience en puisant dans les traditions culturelles et religieuses. Lancée en 2017, l'initiative conjointe UE-OIM pour la protection et la réintégration des migrants est mise en œuvre dans 13 pays de la sous-région, en tenant compte des multiples niveaux de résilience qui coexistent et se complètent.

Les nouvelles technologies de l’information sont également intégrées par l’OIM, pour faciliter l’accès aux ressources et informations disponibles. L’OIM recourt régulièrement au e-learning pour diffuser un contenu qui s’adresse à un public de non-professionnels. C’est un moyen efficace de renforcer les capacités d’acteurs impliqués dans le soutien psychosocial communautaire. Récemment, l’OIM a mis en ligne, des informations sur les services de santé accessibles dans huit pays de la sous-région : Côte d’Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Liberia, Nigeria, Sénégal et Sierra Léone.

À l’OIM, l’approche psychosociale holistique et axée sur la résilience contribue véritablement à améliorer les conditions dans lesquelles les migrants réintègrent leurs communautés. Comme le rappelle Émilie Sepulchre : « l’intervention psychosociale sur le lieu de réintégration du migrant est très importante et son effet s’évalue à l’aune de la pérennité de la réinsertion familiale ».