Au bord du Sahara tchadien se trouve Faya, la plus grande ville du nord du pays, un centre commercial dynamique qui attire depuis des siècles des migrants d’autres régions du Tchad ainsi que des pays voisins.

De par sa situation stratégique, la ville est un carrefour historique des migrations sahéliennes, caractérisée par une mobilité saisonnière liée aux échanges de biens manufacturés, de produits agricoles comme les dattes, ou encore le commerce de l’or.

Ces mouvements dans le nord du Tchad sont facilités par des réseaux communautaires établis selon des liens claniques, ethniques ou géographiques qui jouent un rôle clé dans la fourniture d’une protection sociale et psychologique.

« Quand quelqu’un arrive pour la première fois, il est dirigé vers nous, chefs de race. Nous les accueillons toujours parce que c’est ainsi que nous faisons dans notre culture », dit Ousman, un leader de la communauté haoussa du nord du Tchad.

Ousman est généralement le premier point de contact d’un nouvel arrivant dans la ville. À 33 ans, le « chef de race », comme on appelle communément les chefs de communauté à Faya, a été désigné il y a quelques mois pour s’occuper de la communauté haoussa grandissante de Faya. « En tant que représentant de ma communauté, mon rôle est de protéger mon peuple, mais aussi de le guider et de le sensibiliser à une migration sûre », ajoute-t-il.

Dans toute l’Afrique de l’Ouest et du Centre, les migrants, en particulier les jeunes et les femmes, sont souvent contraints ou attirés hors de leurs communautés sous de prétextes fallacieux vers des voyages dangereux par des passeurs et des trafiquants qui profitent de leur vulnérabilité.

Pour certains d’entre eux, le voyage passe par le nord du Tchad qui borde la Libye, l’une des destinations préférées des migrants à la recherche de meilleures opportunités économiques.

« De nombreux migrants se retrouvent bloqués à Faya ou plus loin dans le désert avec peu ou pas d’aide », déclare Elie Sztorch, responsable du sous-bureau de l’Organisation internationale pour les migrations à Faya. « La mobilité au nord du Tchad est très dynamique », il poursuit, « Les gens sont toujours venus s’installer de façon permanente ou semi-permanente pour différentes raisons, notamment le commerce et le troc. De nombreuses personnes transitent également par la ville lors des voyages plus au nord pour trouver des opportunités de travail, mais parfois, ces voyages ne se terminent pas bien ».

« Les jeunes sont parfois victimes de la traite ou du trafic à des fins d’exploitation et se retrouvent bloqués dans le désert avec peu d’aide. Les leaders communautaires peuvent orienter ces migrants vulnérables vers l’OIM où ils peuvent recevoir une assistance médicale et psychosociale », déclare Haoua Khamis Dago, coordinatrice du programme d’aide au retour volontaire dans le nord du Tchad.

L'un des principaux rôles d'Ousman en tant que leader de la communauté est de coordonner avec l'OIM lorsque des migrants vulnérables ont besoin d'une aide urgente, médicale, psychosociale ou assistance au retour. Photo : OIM/Andrea Ruffini 2021

Le travail des leaders communautaires comme Ousman est officiellement reconnu par les autorités locales, et ils peuvent servir d’intermédiaires entre les autorités ainsi que l’OIM et les nouveaux arrivants qui n’ont pas les bonnes informations et les documents requis.

« Parfois, les gens viennent à Faya sans rien dans leurs poches, sans aucune pièce d’identité ni argent. Ils ont quitté leurs maisons à la recherche de meilleures conditions économiques, mais la plupart d’entre eux ne sont pas pleinement conscients de ce qui les attend », dit Ousman. « Je comprends leur situation et leur désespoir, alors je vois quelles sont leurs compétences et je les aide à trouver un emploi afin qu’ils puissent au moins trouver un travail et pouvoir subvenir dignement à leurs besoins. Nous méritons une vie descente ».

Depuis 2011, l’OIM travaille avec des leaders communautaires de migrants comme Ousman pour accroître l’accès aux services de protection et d’aide de l’OIM aux migrants en situation de vulnérabilité voyageant dans la ville du nord. Ces services comprennent l’hébergement, la nourriture, la santé, l’assistance psychosociale et le regroupement familial. L’OIM gère également un centre d’accueil où les migrants à la recherche d’un abri temporaire peuvent être hébergés.

Les leaders communautaires soutiennent ces efforts en sensibilisant leurs pairs à une migration sûre. « Nous utilisons notre réseau de communautés situées à travers le pays pour encourager les migrants potentiels à rechercher plus d’informations avant de voyager », dit Ousman. « Nous leur parlons de l’OIM et des services de protection auxquels ils peuvent accéder ».

 

Cette histoire a été écrite par François-Xavier Ada.

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