À Vélingara, une ville rurale située le long de l'autoroute du sud du Sénégal, à 570 kilomètres au sud de la capitale, Dakar, Ousmane Diallo, 33 ans, tient un commerce de pneus prospère. Le magasin est sa fierté et le voir entièrement approvisionné lui remplit le cœur de joie - il y a sept ans, ce n'était pas la réalité pour ce mécanicien de formation.

Poussé par l’absence d'emploi et encouragé par les récits d'amis ayant réussi à atteindre l'Europe, il leur a emboité le pas en 2015 et a entrepris un périple qui s'est terminé en Libye. Après avoir sans cesse subi les mauvais traitements et l'exploitation, et après de multiples tentatives infructueuses de traverser la Méditerranée pour atteindre les côtes européennes, et trois incarcérations, il est revenu au Sénégal un an plus tard avec l'aide de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).

« Vous ne trouverez pas un seul jeune aujourd'hui qui soit paresseux, tout le monde veut réussir », explique Ousmane.

Le chômage des jeunes représente l'un des plus grands défis mondiaux. Les jeunes ont du mal à trouver un emploi et sont plus susceptibles (que les personnes âgées de 25 ans et plus) d'être sans emploi. Bien que des progrès aient été réalisés dans la réduction des taux de pauvreté des travailleurs, la proportion de travailleurs pauvres reste obstinément élevée en Afrique subsaharienne.

Au Sénégal, le taux de chômage atteint 16,9 pour cent, la tranche d'âge des 15-35 ans de la population active étant la plus touchée. Cette situation, à laquelle s'ajoutent les effets néfastes des changements climatiques sur l'agriculture et la pêche, a aggravé la situation, privant une majorité de jeunes de moyens de subsistance suffisants.

« Les jeunes rencontrent de nombreuses difficultés dans cette région », confirme Keba Sonko, président de l'association des jeunes d'Abéné. « Beaucoup de jeunes sont sans emploi. Nous parlons aux jeunes et discutons des moyens pour eux de trouver du travail au lieu d'aller ailleurs. »

« Vous ne trouverez pas un seul jeune aujourd'hui qui soit paresseux, tout le monde veut réussir », dit Ousmane. Photo : OIM 2022/Alpha Ba

Malgré les possibilités de formation offertes aux jeunes, beaucoup hésitent à s'inscrire à une formation de trois ans tout en subvenant à leurs besoins, et dans de nombreux cas à ceux de leur famille, sans aucun revenu pendant cette période.

« Il faut qu'ils comprennent qu'il y a des possibilités de formation ici aussi, dans tous les domaines, dans l'hôtellerie, dans l'agriculture, la mécanique, la plomberie ; mais trois ans de formation, c'est difficile. Beaucoup de gens se sont inscrits mais, malheureusement, ils n'ont pas reçu les fonds », ajoute Keba. 

L'OIM soutient les migrants qui décident de rentrer volontairement à la fois pour leur retour et leur réintégration, en leur proposant des formations et en créant des opportunités d'emploi. Au Sénégal, des projets communautaires sont ouverts aux membres de la communauté et aux des migrants de retour afin de générer des revenus supplémentaires pour leur famille et de favoriser la cohésion sociale.

Lorsqu'il est retourné en Casamance, Ousmane a participé à une formation commerciale de cinq jours organisée par l'OIM, qui lui a appris, ainsi qu'à un groupe d'autres migrants de retour, à créer une entreprise. A l’issue de la formation, les participants ont reçu 500 000 francs CFA plus 150 000 francs CFA (1 000 euros au total) dans le cadre du soutien de l'OIM aux efforts nationaux de relèvement face à la COVID-19, pour les aider à démarrer leur entreprise.

Ousmane au travail dans son magasin, un commerce de pneus qu'il a lancé avec le soutien de l'OIM. Photo : OIM 2022/Alpha Ba

La formation s'appuie sur l'expérience antérieure ou les apprentissages des participants. Ousmane a utilisé la subvention pour ouvrir un commerce de pneus ; au début, il n'avait qu'une petite machine pour gonfler les pneus. Aujourd'hui, il montre fièrement une grosse machine, qu'il a achetée pour 450 000 francs CFA. Il utilise les revenus de son garage pour diversifier son activité, et a démarré des activités agricoles à côté.

La Casamance est régulièrement touchée par divers aléas climatiques, qui ont un impact direct sur l'agriculture et, par conséquent, sur les moyens de subsistance et les modes de vie des communautés concernées. Une conséquence courante est la décision de nombreuses personnes, en particulier les jeunes hommes, de quitter la région à la recherche d'un meilleur moyen de subsistance ailleurs. Dans la région voisine de Kafountine, la réduction de la pêche et la salinisation des rizières ont eu des effets négatifs sur les activités économiques, en particulier pour les femmes.

L'OIM a organisé un dialogue communautaire à Abéné en juillet 2021 pour discuter des effets des changements climatiques et de la dégradation de l'environnement dans la région. Il est ressorti des discussions le manque de formation dans le traitement et la conservation des produits locaux, ainsi que la nécessité de stratégies d'adaptation au climat. Les participants au dialogue communautaire se sont plaints de ne plus pouvoir poursuivre les activités de maraîchage et de riziculture et d'être évincés de l'unité de transformation.

Le dialogue communautaire a également été l'occasion de sensibiliser aux risques de la migration irrégulière et aux alternatives durables dans le pays. « Grâce au travail avec l'OIM, nous avons fait comprendre aux gens qu'au lieu de dépenser 400 000 francs CFA pour voyager, ils peuvent utiliser cet argent pour investir dans leur vie et faire quelque chose de bien », déclare Keba.

Cette histoire a été écrite par Kim Winkler, rédactrice pour l'OIM en Afrique de l'Ouest et Afrique centrale.

SDG 1 - PAS DE PAUVRETÉ
SDG 8 - TRAVAIL DÉCENT ET CROISSANCE ÉCONOMIQUE
SDG 10 - INÉGALITÉS RÉDUITES